Faut-il interdire les devoirs a la maison ?

Lux, c'est exactement le sentiment que j'ai eu comme professeur: les moyens ne suivent tellement pas qu'au bout d'un moment j'ai vu que si, j'aidais certes quelques élèves défavorisés dans une année, je ne faisais que reproduire et conforter les inégalités sociales, gros cynisme et écoeurement et dieu sait que je suis sensible à cette problématique car je viens d'un milieu modeste et l'école a été ma planche de salut.
Encore une fois, la question des moyens est essentielle: qui fera cet encadrement, comment, avec quels moyens ? Si c'est pour faire garderie avec un personnel sous-payé et non formé afin de calmer, endormir les gens qui votent: gaspillage et sans intérêt. Je redoute encore une mesure démago à la con qui ne sera d'aucune utilité pour faire avancer les choses et qui laissera l'école surtout pour les coins difficiles toujours en aussi mauvais état. On aboutit toujours à la fin à un nivellement par le bas dont les premiers touchés sont les enfants les plus défavorisés. Pour moi, l'école de la république est morte depuis longtemps, celle qui m'a permis de m'ouvrir, m' a donné ma chance comme à tous les autres, m'a permis d'accéder au savoir et trouver ma place en société, pas une place au rabais. Trente ans plus tard, ce n'est plus vraiment possible: je l'ai d'autant plus vu que je suis revenue enseigner dans le collège de banlieue, bon à l'époque, qui fut le mien élève et dans lequel va désormais mon fils. Claque monumentale. Maintenant je suis du côté des favorisés, de ceux qui peuvent nourir, accompagner leurs enfants, pallier aux insuffisances du sytème. Tout va bien pour mon enfant, alleluia. Mais combien d'autres enfants sont laissés sur le bord du chemin avec autant de compétences que mon fils mais sans une maman aussi avertie, connaissant parfaitement le système et ses astuces, ses failles et comment y remédier? Je n'arrive toujours pas à l'accepter.

Ah bah oui parlons en des moyens ! Depuis peu on réduit les effectifs d'enseignants et maintenant on veut nous faire croire qu'il y aura assez de personne pour consacrer plus de temps à nos chers jeunes gens... Je me demande bien comment ils vont mettre en place ce dispositif alors que l'on sait bien qu'il y a moins de personnes compétentes aujourd'hui...

Et si c'est bien comme Lux nous l'a dit, moi ça m'inquiète un peu quand même... Surtout que le "surveillant" va se retrouver con s'il est pas au niveau quand un gamin lui posera une question et qu'il ne saura y répondre... :/

Et puis Guthrie je suis pas sûr que ton analyse soit bien pertinente sur la fin... J'ai toujours été un élève moyen, et en plus niveau débrouillardise on peut pas franchement dire que je prenne ma revanche sur qui que se soit... Enfin j'ai peut-être mal compris ton raisonnement et mon exemple n'est peut-être pas le meilleur (je suis un fainéant je l'avoue...).

LordToms : ils sont censés recruter 60000 personnes à l'éducation nationale pendant les 5 ans du quinquennat (au détriment d'autres ministères).

J'ai effectivement trouvé aberrant le massacre qui a été fait sur l'EN - tout comme le coup de faire rentrer des professeurs "n'importe comment" sans formation ... Je re-cite Luc Ferry : on lui a dit qu'on bon ministre de l'éducation nationale à droite était un ministre qui virait le plus de fonctionnaires sans faire de vagues. Il a vite compris qu'il ne ferait pas la politique qu'il aurait voulu faire ...

En tout cas, je suis fils de prof, et je peux vous dire que je n'étais ni au premier rang, ni parmi les premiers. Je n'étais juste pas mauvais, très curieux, mais un brin paresseux ou sélectif. On m'a mis en classe "européenne" - CAD avec deux langues vivanges 1 dès la 6ème (et les heures qui vont avec) ... ce qui aurait pu être bien, si encore on ne m'avait pas infligé comme second choix l'Allemand pour que je sois dans "une bonne classe" (eh oui, même les profs ont leurs clichés, je peux vous dire qu'il y avait de sacrés petit cons en Allemand aussi).
Par contre effectivement, le fait que ma mère soit prof m'a transmis une certains curiosité - je me rappelle qu'en CM1/CM2 je lisais ses copies de 4e (physique / géologie / biologie) et j'apprenais plein de choses - et je voyais aussi pas mal de fautes ... Mais cette transmission de curiosité aurait très bien pu se faire avec des parents issus d'un autre métiers, ouvert et s'intéressant de manière générale à des sujets divers (histoire, lecture, collections, actualité). Ma femme a par exemple beaucoup appris tout simplement en lisant la presse : ses parents tenaient alors un café/tabac/pmu/presse (avec les horaires qui vont avec) et elle avait plein de journaux à disposition. Cet exemple est d'ailleurs l'exacte opposé de ce que tu dis : profs et profession libérale (le PMU n'étant pas très CSP++ à ma connaissance).

Moi je comprends Guthrie et LT sur la débrouillardise.
En effet, venir d'un milieu modeste où le savoir s'arrache, se vole te fait comprendre très tôt que tu ne peux compter que sur toi- même et que le parcours pour toi ne sera jamais aisé. Et donc, tu apprends le sytème D, franchis les obstacles malgré tout. En fait, accéder au savoir de cette manière m'a bcp appris sur moi et les autres et je ne voudrais pas d'autre chemin si c'était à refaire, même si j'ai parfois, souvent rêvé de parents lettrés avec une belle bibilothèque.
Mon parcours n'est pas exception pour les quadra: bcp de copines, connaisances venant de milieu modeste qui ont pu faire leur chemin. Mais c'est de moins en moins possible, ça c'est révoltant car l'éole est hien attaquée. Un exemple symptomatique, à mon époque, on pouvait s'inscrire en fac où on voulait. Je suis allée à la Sorbonne, j'ai découvert des milieux sociaux, des mondes inconnus, les locaux mêmes me stupéfiaient tant je n'avais jamais vu de choses aussi belles, les salles, la bibliothèque pour étudier jusqu'alors. Avec la sectorisation qui est ghettoïsation, désormais, j'aurais dû aller dans une fac pourrie de banlieue alors que la Sorbonne est réservée aux Parisiens. Ça aussi, ça me révolte. Et c'est le sort qui attend mon enfant s'il va en fac si je ne bidouille pas pour contourner. L'effet positif est que "non, ce n'est pas possible pour toi" ne fait pas partie de mon vocabulaire, un non ne m'a jamais arrêtée bien au contraire.

Pour LT, oui, le premier qui sort d'un milieu défavorisé n'a pas tous les atouts, il essuie souvent les plâtres et ce sont souvent ses enfants qui eux auront accès aux parcours plus prestigieux qui sont le chemin évident, normal pour les plus favorisés. Je n'ai pas fait des études exceptionnelles par une grande école car je ne savais même pas que cela existait, ni de quoi il s'agissait donc même pas eu l'idée de postuler. Mon fils lui saura de quoi il s'agit et pourra y accéder s'il travaille bien.

Ijja a écrit:Mon fils lui saura de quoi il s'agit et pourra y accéder s'il travaille bien.

Et ton fils travail bien notamment parce que tu t'en occupes bien. La base, ça reste les parents et ce qu'ils veulent transmettre à leurs enfants.

C'est la base, oui, Mathieu. Beaucoup font des enfants par égoïsme, pour égayer la morne platitude de la vie. Ca les occupe un temps puis ils ne s'en occupent plus. Ceux-là devraient acheter un poisson rouge à la place ou un téquel.

Guthrie a écrit:C'est la base, oui, Mathieu. Beaucoup font des enfants par égoïsme, pour égayer la morne platitude de la vie. Ca les occupe un temps puis ils ne s'en occupent plus. Ceux-là devraient acheter un poisson rouge à la place ou un téquel.

+ 1000. Je suis carrément réac' sur ce point et pas très compréhensive tant cela peut être écoeurant à voir quand tu es prof. Parfois, certains s'occuperaient mieux d'un chien que de leur enfant,pour des choses basiques comme la proprété et la nourriture, alors qu'il y a l'argent pour. Je suis très cynique là- dessus, désabusée. Certains parents, pas tous, heureusement, mais ceux- là, je ne les comprends pas et ne les excuse pas. Quand il y a l'argent pour et donner un peu d'attention à son môme.

MathieuMf a écrit:LordToms : ils sont censés recruter 60000 personnes à l'éducation nationale pendant les 5 ans du quinquennat (au détriment d'autres ministères).

Ah... C'est marrant parce que pendant le quinquennat précédent il était question d'en virer le même nombre... Voilà une bonne nouvelle... Mais j'espère qu'ils seront des formateurs/instituteurs/profs exemplaires et pédagogue... Ça m'a cruellement manqué des profs qui arrivaient à te faire apprendre des choses tout en te faisant rire ou au moins en rendant le cours ludique... j'en ais eut bien sur, mais peu hélas. Et moi c'est bien connu je marche à l'humour !

Et je suis d'accord avec toi Ijja, si les parents s'occupent un minimum de leurs enfants ça réduit quand même pas mal la possibilité d'un échec... Et je vais vous dire... Très franchement un parent qui encourage son enfant à s'orienter dans une voie qu'il désire, ça vaut tout les beaux discours... Personnellement mes parents ne m'ont pas franchement aidé là dessus... Mais je crois que je suis un peu trop influençable parfois... J'ai toujours été un gamin naïf qui croyait que quand on lui disait : "non, ce n'est pas possible pour toi" il fallait juste écouter les adultes et fermer sa gueule... Si je m'étais vraiment écouté je ne ferais pas de l'informatique... -_-

LT : tu aurais voulu faire quoi ?
En tout cas point positif avec l'informatique en ce moment - normalement il y a du taf

Ceux-là, ils laisseraient le chat pêcher avec sa patte le poisson rouge et le déguster, et le teckel, ils l'abandonneraient en partant en vacances parce qu'à l'hotel et sur le plage...
Ce sont les mêmes, majoritaires dans notre agrégat de profiteurs de tout et de n'importe quoi (c'est cela que vous semblez appeler de la "débrouillardise"). Quand on se décidera à enlever à leurs parents, pour un temps ou perpétuellement, ceux qui ne prennent pas ces jouets de parents modernes, pour ce qu'ils valent comme êtres sociaux, à éduquer comme il faut (et cela ne nécessite pas des moyens matériels considérables), les choses changeront. On fera moins d'enfants parce que ça fait bien d'en avoir, mais véritablement comme un devoir de reproduction de l'espèce dans les meilleures conditions pour l'espèce.
Je méprise ces parents qui font joujou avec leurs petits et qui les délaissent à la moindre migraine, qui profitent de tout le système d'aide, et qui s'en foutent du résultat, du moment qu'ils ont un bisou le soir, avant les copains qui arrivent !

Lord voulait faire chevalier. Mais c'est un métier d'élite. Et puis il faut savoir monter à cheval, savoir le bouchonner, connaître le langage des oiseaux... Non, on dirait pas mais c'est tout un bordel !

Non Hérodote, la débrouillardise n'a rien à voir dans mon propos avec cela. Il s'agit quand le savoir est une lutte de pouvoir franchir les obstacles dont le principal est l'argent: se faire prêter les livres en bibliothèque, les photocopier, jongler avec un petit boulot. Rien à voir avec les parents qui ne tiennent pas la route. La débrouillardise est pour les enfants qui doivent fournir plus d'efforts et ce n'est pas une insulte loin de là.

Bof... Paradoxalement on te demande d'avoir minimum deux ans d'expérience professionnelle dans le domaine et personne pour en proposer de l'expérience... Du coup bon... Bref... J'aurais préféré faire un métier plus artistique comme l'est ma personnalité... Mais c'est pas le sujet passons...

Y a pas à dire... Les parents auront beau avoir du fric et payer de jolies choses à leurs enfants, s'ils ne s'en occupent pas comme il faut ces choses là sont d'un superflu...

@ Guthrie : Ouais c'est pas faux !

Ce sont les mêmes, majoritaires dans notre agrégat de profiteurs de tout et de n'importe quoi (c'est cela que vous semblez appeler de la "débrouillardise".

Je ne vois pas non plus le rapport, Hérodote. On ne parlait pas de ça.

@ Lord

Heu... pareil... Où est le rapport ? Il ne faut pas tout mélanger là...

Absolument Toms ! Ce dont un enfant a besoin c'est avant tout d'amour et d'attention, d'une prise en charge affective suffisante, pas du dernier gadget à la mode... En outre cela lui permet d'acquérir plus de confiance en lui. Aucun bien matériel ne se substituera à l'apport affectif, je pense qu'il est inutile d'être pédopsychiatre pour s'en convaincre.

Pour moi, la meilleure école c'est celle qui fait raisonner la passion dans le coeur de l'enfant, et les seuls devoirs qu'il doit rendre son ceux qu'il travaille chaque soir dans ses rêveries d'avenir...

C'est pour ça que je t'adore Olive... Sur ce point là on est d'accord, et il me semble que c'est la chose la plus importante. Donner le goût et la curiosité à son enfant... Ça a plus d'importance que n'importe quel confort. Il est toujours préférable d'avoir des parents consciencieux et modestes, que des parents aisés et peu soucieux de leur enfant.

Si un jour il m'est donné d'avoir un enfant, je préférerai lui consacrer du temps plutôt que le consacrer à gagner de l'argent... Bien sûr il faut travailler et gagner de l'argent pour vivre, mais pas au détriment de son enfant bordel ! (oui je dis bordel parce que je suis pas content ! Roh la la ! pas bien !)

Ouais, Lord. Olive c'est notre aède des temps modernes !
Hip hip hip : houraaa !

[HS] LT : pour l'expérience, c'est pareil partout. Effectivement, une boite aura du mal à prendre un jeune sans expérience directement sorti de l'école - et préférera le former en alternance pour l'embaucher à la fin. Sauf si ce dernier a fait des jobs d'été dans le domaine, des stages dans le domaine, ou surtout montre une réelle motivation pour ce qu'il veut faire et a fait du travail personnel (je sais que j'attache beaucoup d'attention à ça - si le gars a 0 expérience mais qu'il a monté un projet sympa lié à ce que je vais demander, ça compte autant qu'un taf) [/HS]

Guthrie a écrit:Ouais, Lord. Olive c'est notre aède des temps modernes !
Hip hip hip : houraaa !

Blague à part, Olive, tu dirais quoi alors aux petits Japonais qui ont tous le petit gadget technologique dernier cri dans leur poche ? Même s'ils savent que ça ne sert à rien, là-bas, la technologie est considérée comme une réelle culture. C'est même un devoir de bon citoyen, au même titre que chez nous l'Education Civique. Regarde, l'éducation civique non plus ça sert à rien. Pourtant on l'apprend parce que c'est notre devoir. Quand on voit après comment fonctionne l'appareil de l'Etat, et les éternels marchandages électoralistes, on sait bien une fois adulte - ou ado éveillé - que c'est du vent qu'on nous apprend. Pourtant on s'en accommode.

Je vais essayer de te répondre en trois points : le premier concernant les petits japonais. Pour moi c'est de l'assistanat pur et simple, qui plus est dangereux pour les rapports à autrui. Les petits japonais ont-ils encore la notion de ce qui était enseigné à leurs ancêtres en matière de morale et de principes philosophiques ? Pas certain. Je ne vis pas au Japon, je ne les connais pas, mais je vois comment fonctionne leur société, solidaire mais horriblement irrespectueuse de l'être (mécanisation, automatisation, uniformisation), et de la nature (massacre inconsidéré de certains animaux marins). Deuxième point, l'éducation civique, je ne dirais pas qu'elle ne sert à rien, mais disons que la forme antique n'est peut-être plus adaptée à notre temps ? en outre l'enfant n'est pas un produit formaté; moi j'ai une opinion particulière sur l'éducation et l'évolution de l'enfant, mais j'aurai l'occasion d'y revenir. A la limite nous pourrions la remplacer par quelque chose de plus adapté à notre époque (mais pas sur les grandes lignes), d'ailleurs nous en avons beaucoup discuté dans un autre topic. Troisième point, c'est vrai que nous nous accommodons des marchandages électoralistes, mais cela ne nous empêche pas de réaliser qu'ils peuvent être hypocrites, c'est justement pour cela que nous essayons de faire en sorte que les jeunes ne reproduisent pas les mêmes schémas. Je pense que le fait de penser par soi même est toujours la clef, et les jeunes doivent apprendre à avoir ce réflexe.

Et puis merci de m'avoir comparé à un aède, c'est trop d'honneur !

Merci Olive de cette précision.
Y'a matière à relancer le débat.

De rien Guthrie Oui, il y a matière à débattre en effet...

Bon, on en saura plus demain je pense :

Vincent Peillon sera l'invité de @mediapart [Accès libre], le 19 octobre 2012 à 20H30 !