La lecture

Ah Marceline Desbordes Valmore ! (se reporter au topic que j'ai publié sur elle dans la section poésie) Quelle merveille !

Par contre je ne connais pas assez Tristan Corbière, il faudra que je m'y mette...

Nelson a écrit:Chapeau !
Personne ne lit plus Tristan Corbière.
Inclassable, et original.
J'adore son "Epitaphe"

Et ça me désole. Quelle inventivité dans le verbe, quelle incroyable hésitation entre la noirceur risible et la passion amoureuse...
J'aime particulièrement le poème qui ouvre le recueil, "Ça", cette interrogation qui lui vient des tripes sur ce qu'est son écriture, ce qu'est son art — savoir, au fond, s'il est même artiste.
Il me bouleverse.

Spirale a écrit:Je crois bien que je n'ai jamais lu de poésie de mon plein gré.

C'est la récitation de poème à l'école qui t'as rendu réticent ?

Je plaisante bien sûr. Pour ma part j'ai plus tendance à écrire des poèmes qu'à en lire... Mais mon préféré ça restera toujours Hugo dans ce domaine (alors que le bougre il a écrit bien plus d’œuvres en tout genre que de poèmes. Mais quelle plume !)

Tu me donnes une idée Pimbi, il faudra que je lise moi aussi.

Je ne suis pas très originale non plus en ce qui concerne la poésie... lire "le Bateau ivre" me met en transe, littéralement. Que j'aime les poètes maudits !

Moi je me suis pris de passion pour la poésie assez jeune, mais je suis longtemps resté dans un état un peu végétatif à ce sujet ! Jusqu'à récemment, disons deux ans, où j'ai retrouvé le goût de la composition.

Non, au contraire, j'adorais apprendre des recitations, comme j'ai adore plus tard apprendre un texte pour le jouer au theatre.

Je ne sais pas, c'est un genre que l'on ne m'a jamais appris a aimer. Et n'etant jamais tombe par hasard sur une poesie, je ne m'y suis jamais interesse.
J'ai lu des romans quand j'etais petits, des Agatha Christie, des Conan Doyle, des trucs comme ca, je n'etais pas un grand lecteur.

Je n'ai jamais ete eduque a la litterature... ce qui constitue un enorme regret, comme je l'ai deja dit.

De mon côté, mes études ont été le vrai déclic quant à mon amour de la poésie. J'ai suivi un cours de versification et de stylistique qui m'a absolument enchantée en licence... j'ai découvert Rimbaud, Verlaine, jusqu'aux tréfonds de chacune de leurs rimes, de chacune de leurs césures, et ça a été un bonheur immense.

Olive1968 a écrit:Tu me donnes une idée Pimbi, il faudra que je lise moi aussi.

Vas-y, lance-toi : il commence par une longue description des moeurs dans les îles anglo-normandes. C'est passionnant, cette façon d'introduire l'action par une étude.

Spirale a écrit:Je n'ai jamais ete eduque a la litterature... ce qui constitue un enorme regret, comme je l'ai deja dit.

Idem... Nous ne sommes pas vraiment une famille de littéraire si je puis dire. Bien que mon frère m’ait surpris en choisissant d'entrer en L au lycée. Comme je l'envie parfois... Si j'avais eut autant de caractère que lui... Pardon je dérive du sujet...

Lux Lisbon a écrit:De mon côté, mes études ont été le vrai déclic quant à mon amour de la poésie. J'ai suivi un cours de versification et de stylistique qui m'a absolument enchantée en licence... j'ai découvert Rimbaud, Verlaine, jusqu'aux tréfonds de chacune de leurs rimes, de chacune de leurs césures, et ça a été un bonheur immense.

J'aime beaucoup Rimbaud aussi c'est vrai. Tu viens de m'y faire penser. Je regrette de ne pas avoir lu plus d’œuvre de cet artiste. Mais il n'est jamais trop tard.

Tu peux acheter facilement et peu cher ses poésie complètes, Rimbaud est assez accessible. Sa fulgurance m'étonne toujours, en 6 mois il est passé d'une esthétique parnassienne à la Bainville pour passer à une esthétique nouvelle qu'il créé de toute pièce dans la lignée de Baudelaire avec des poèmes en prose notamment comme "Ornières" que j'apprécie beaucoup. Ce qui est assez intéressant c'est de voir le côté transgressif de Rimbaud, il y'a un véritable plaisir à le voir passer du cynisme des décadents à une forme de lyrisme nouvelle. Il y'a une véritable assise métaphysique chez lui.

Nabokov avait donné des cours aux Etats-Unis, dans l'un d'eux il évoque la lecture et précise une chose avec laquelle je suis assez d'accord en ce qui concerne le roman et la poésie : lire non pas pour s'évader comme un adolescent, non pas pour apprécier la musique comme un esthète, non pas pour apprendre comme un érudit mais pour ressentir un léger frisson de plaisir. Tout le reste vient après. Que ce soit l'érudition ou l'évasion. La lecture c'est une rencontre, une rencontre de l'autre qui apprend sur soi même : Proust nous apprend autant sur le narrateur de la Recherche que sur nous même, en somme c'est en se regardant soi même comme un autre qu'on se forme, en cela la lecture est infiniment formatrice existentiellement. C'est aussi cette rencontre avec l'altérité qui engage ce frisson de plaisir et qui ouvre à la tolérance aussi bien qu'à la subtilité.

Pour ce qui est de la lecture historique ou philosophique l'enjeu est tout autre, la soif d'apprendre évidemment, et puis de connaître, de comprendre, sans juger ( comme le dit ma signature, si je traduis du latin : ne pas blâmer , ne pas juger, mais comprendre ). On pourrait écrire des pages entières sur les buts, les intérêts de la lecture, sans jamais arriver au bout. Je crois qu'en lisant certains auteurs, comme Borgès récemment, je me suis senti meilleur à la fin du livre, changé. Voilà l'effet d'une vraie lecture ( qui n'est pas faite pour passer le temps et occuper son ennui ...).

Certes, Little; mais toi, tu es sérieux non-stop !
Mais nous, simples mortels, avons le droit de nous amuser un peu, à l'aide de lectures un peu plus lestes, non ?

Littlewingrunner a écrit:Nabokov avait donné des cours aux Etats-Unis, dans l'un d'eux il évoque la lecture et précise une chose avec laquelle je suis assez d'accord en ce qui concerne le roman et la poésie : lire non pas pour s'évader comme un adolescent, non pas pour apprécier la musique comme un esthète, non pas pour apprendre comme un érudit mais pour ressentir un léger frisson de plaisir. Tout le reste vient après. Que ce soit l'érudition ou l'évasion. La lecture c'est une rencontre, une rencontre de l'autre qui apprend sur soi même : Proust nous apprend autant sur le narrateur de la Recherche que sur nous même, en somme c'est en se regardant soi même comme un autre qu'on se forme, en cela la lecture est infiniment formatrice existentiellement. C'est aussi cette rencontre avec l'altérité qui engage ce frisson de plaisir et qui ouvre à la tolérance aussi bien qu'à la subtilité.

Je ne connais pas les cours de Nabokov mais décidément, cet homme était extraordinaire. J'ai rarement lu des romans aussi forts et bien écrits que Lolita.
Le frisson de plaisir, voilà une notion incroyable à mettre en relation avec la littérature.

Nelson a écrit:Certes, Little; mais toi, tu es sérieux non-stop !
Mais nous, simples mortels, avons le droit de nous amuser un peu, à l'aide de lectures un peu plus lestes, non ?

C'est vrai que là bien que je sois fasciné par ce que tu as écris Little, je rejoins Nelson. Il n'y a pas de mal à se faire du bien de temps à autres. Il faut savoir apprécier les petites choses futiles de la vie. Je ne dis pas non plus de tomber dans la lecture facile de magazine (comme les magazines people par exemple) qui ne sont bon qu'à occuper le temps des vieilles filles. Mais quand même un bon roman de Conan Doyle ou de Bradbury ça a toujours sa petite valeur à vous faire voyager dans l'imaginaire. Et j'adore ça !

Nelson franchement je me marre bien quand je lis Lautréamont ou Cioran, ou même Flaubert. Flaubert me fait même mourir de rire, Bouvard et Pécuché c'est une pièce comique, la dérision est absolue. D'ailleurs opposer le sérieux et l'humour ne me semble pas pertinent. Puisqu'on parlait de Corbière, celui ci a écrit des poèmes, comme " A une lectrice" ou "Comment écrire un sonnet" ( je cite de tête les titres ils ne sont peut être pas exacts ) qui sont emplis d'humour grinçant ou plus léger et pourtant présente un intérêt littéraire certain.

Je suis bien d'accord Lux, Nabokov est un esprit rare. Si tu n'as pas vu l'adaptation cinématographique par Kubrick je te le conseille, on retrouve bien l’atmosphère du roman et la caméra mime l'écriture de Nabokov avec ses moyens.

"Je ne l'ai point encore embrassé d'aujourd'hui !" (Racine)

Andromaque, au milieu des périls, songe à serrer son petit Astyanax contre elle. Tout contre elle. Ce point d'exclamation charnel éclate au milieu d'horreurs.
Si relire cela n'est pas lire, que faut-il donc lire ?

Bravo, Pimbi pour les "Travailleurs de la mer". Hugo avait même devancé Jules Verne. Quel homme! J'ai "Victor Hugo révolutionnaire" offert et dédicacé par Jean-François Kahn. C'est encore une autre face de Hugo. Le récit documenté de ses funérailles, jusque dans le public qui y assistait, montre à quel niveau peut monter la ferveur populaire quand on l'excite vers le Beau, donc le Bien.

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moua ge li ke lé avantur de ouioui é de son copin potiron !!!!

Littlewingrunner a écrit:Je suis bien d'accord Lux, Nabokov est un esprit rare. Si tu n'as pas vu l'adaptation cinématographique par Kubrick je te le conseille, on retrouve bien l’atmosphère du roman et la caméra mime l'écriture de Nabokov avec ses moyens.

Je l'ai vue et bien que grande amatrice de Kubrick, je l'ai trouvée assez moyenne et plate. Probablement parce qu'il était assez problématique d'aller aussi loin que Nabokov avec des images... L'adaptation de Lyne, plus récente, est probablement moins poétique mais colle au plus près du texte ; et j'avoue que j'ai un plaisir immense à visualiser Humbert Humbert en la personne de Jeremy Irons.

Je n'ai pas vu cette dernière, j'y jetterai un oeil, je devrais pouvoir trouver ça en torrent ( même si j'ai du mal, Rohmer, Eustache ou Godard se partagent moins que Lynch ou Coppola ... ).

Il y a plusieurs sortes de moteurs de lecture. Il y a même des moteurs en panne : j'ai déjà dit que ne relisais jamais mes propres bouquins édités. Par contre, je relis souvent ceux dont je m'interdis la publication, histoire de trouver un arrangement qui permette de les publier. Cela ne marche pas du tout. C'est une castration.
Il y a des moteurs professionnels, barbants avec de bonnes surprises (ce n'est plus tellement mon cas à mon âge). Il y a des moteurs de type loisirs, mais si j'aime bien écrire des histoires pour les autres, je n'ai pas de goût marqué pour les récits des autres. Je critique sans arrêt, ce que je ne fais pas avec Racine. Je préfère lire des ouvrages intéressant l'Histoire, spécialement l'Histoire de la Pensée (Jerphagnon, par exemple). Et puis ce qui est Beau : ouvrages sur Praxitèle et Lysippe, sur Beethoven, Chopin, Berlioz, ou des revues musicales. Peu de revues littéraires, que je trouve toutes prétentieuses. Les gens qui savent tout ... Je ne regarde strictement pas la télévision. J'ai, étant cablé, un abonnement TV au minimum à cause du télépnone et d'Internet. Je ne lis aucun journal. Ils sont inintéressants ou me dégoutent. Je lis des ouvrages militants qui sont conformes à mes idées. Pourquoi devrais-je me faire mourir plus vite en ingurgitant des lectures qui me mettent en rogne?. "Je m'économise" comme disait Julien Carette dans un vieux film tiré d'un roman de Marcel Aymé je crois. Voila.

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Moi non plus, je ne lis pas de journaux. Ils ne m'agacent même pas, ils me font hausser les épaules. Et de plus, c'est écrit dans un style de ramoneur de cheminées...
Exception : mon journal en basque Astapito. Là, on rigole...

Nâhämäar a écrit:

Herodote a écrit:Pourquoi devrais-je me faire mourir plus vite en ingurgitant des lectures qui me mettent en rogne?. "Je m'économise" comme disait Julien Carette dans un vieux film tiré d'un roman de Marcel Aymé je crois. Voila.

Soit, c'est donc un parti pris qui est axé sur la nécessité que tu as d'économiser tes batteries?
C'est mignon comme tout, vu sous cet angle, je comprend mieux ton avis sur le sujet.

Ce n'est pas un parti pris; c'est un choix librement consenti.

Exact : suis majeur et consentant !

Mignon ? "Marquise si mon visage
Présente des traits un peu vieux
Vous connaîtrez qu'à mon âge
Vous ne vaudrez guère mieux !" (Pierre Corneille)