Les lobbys

L'exercice de la médecine repose pour l'essentiel sur un système conventionnel entre les organismes de prise en charge (sécu) et les professionnels de santé ; tarifs conventionné sécu, médecins conventionnés appliquant les tarifs sécu et patients pouvant prétendre accéder aux soins et être remboursés... (c'est la raison pour laquelle le patient ne sait plus où il met les pieds, combien ça va lui coûter, il en perd son latin comme son argent.) Paradoxalement, et notamment pour la médecine de ville (ambulatoire), le médecin exerce son activité dans un cadre dit libéral. En 1980, pour faire survivre le système conventionné, les pouvoirs publics ont octroyé par réglementation des avantages et largesses au secteur libéral, activité privée au sein de l'hôpital public, et entre autres les fameux dépassements d'honoraires. Le rôle des pouvoirs publics est de faire vivre, au moyen de la loi s'il le faut, le système conventionnel actuel en préservant l'accès aux soins et leur qualité. Or le dépassement d'honoraires interdit bien souvent l'accès aux soins et véhicule de manière subliminale dans nos esprits que le prix élevé serait une garantie de qualité du soin (ce qui reste encore à démontrer puisque nous ne savons rien du toubib que nous allons consulter, hormis le bouche-à-oreille ou le conseil d'un ami.) Le dépassement d'honoraires, de fait, discriminatoire, participe à l'instauration d'une médecine à deux vitesses. En gros, le toubib se constitue une clientèle friquée, à même de régler le prix qu'il fixe, et laisse les modestes et les démunis crever à sa porte. S'attaquer aux dépassements, tout le monde ici en conviendra, c'est donc salutaire et ça participe à un retour de l'équité.

Or, que s'est-il passé hier ? Rien. Rien de rien. Pire ! Les médecins ont réussi à obtenir un dépassement d'honoraires (jugé acceptable) fixé à 70 euros. Cette espèce de niveau seuil du dépassement, en contrepartie d'une prise en charge de cotisations sociales, c'est faire supporter à la sécu le maintien des revenus de médecins d'une avidité sans mesure. Je souligne au passage que pour débattre de la question, tous les syndicats des médecins ont été conviés, les mutuelles ont été conviées, mais pas le moindre syndicat représentant les patients n'a participé à cette guerre d'intérêt. Pourtant c'est vous et moi qui allons payer la note. Je poste un peu en réaction, ou tout au moins en écho à notre conversation sur la dépénalisation et la légalisation du cannabis. Certains ont dit, pour argumenter leur position contre, que le drogué représenterait un coût pour la société. Pourtant, voyez ! Le lobby des médecins va encore creuser le trou de la sécu en toute impunité et avec l'accord de nos dirigeants. Il est vrai que le drogué ne représente rien en terme électoral. Et nous, nous ne disons rien. Nous laissons faire. Et nous payons sans aucun sentiment d'injustice.