franc-maçonnerie : dominance ou démocratie ?
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franc-maçonnerie : dominance ou démocratie ?
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Vertical / horizontal : une simple dualité ou une opposition dans nos loges ?
En franc-maçonnerie on étudie le vertical avant l’horizontal. Serait-ce pour la même raison qui fait placer la liberté avant l’égalité/fraternité ? Certes, il faut commencer par se connaître, comme individu unique, d’où le un, qui précède le deux, nécessaire si on veut comparer deux êtres ou deux choses sur un critère pour en supputer l’égalité ou l’inégalité. Ce un, barre verticale, précède, lorsque l’on compte, les deux êtres juxtaposés.
Mais le vertical symbolise aussi la relation dominant/dominé, et nos deux derniers millénaires ont vu une marche vers l’égalité des droits. Le dominant peut a priori exercer son pouvoir comme bon lui semble, d’où les expressions comme « le fait du prince ».
Il semble bien que l’écriture ait été inventée pour les inventaires de l’administration, en Mésopotamie selon les connaissances actuelles, preuve que la bureaucratie existait déjà, avec cette fonction d’objectivation par les quantités.
Par extension, les peuples ont accepté les procédures bureaucratiques dans l’espoir ou la croyance qu’il en résulterait un traitement plus égalitaire ou plus fiable. Cependant, toute procédure nécessite fréquemment une interprétation, laquelle sera alors effectuée par un tenant des dominants.
Etape supplémentaire : réclamer des procédures de plus en plus précises, afin d’obtenir la transparence et diminuer les interprétations arbitraires. Mais cela n’aboutit qu’à reporter le pouvoir d’accorder des dérogations aux règles à un échelon supérieur…le vertical gagne toujours, en dernier ressort.
Sous l’étouffoir procédurier liberticide, les peuples ont besoin d’une soupape : ce sera le rêve. D’où le succès des contes de fée dès l’enfance, qui se poursuit ensuite par les légendes, épopées héroïques, mythes, romans … Qu’y voyons nous ? Des héros puissants, bénéfiques ou maléfiques, qui ne s’embarrassent pas de droits, de paperasses, ni d’égalité . La liberté est souvent éliminée dès le départ en créant des hiérarchies d’êtres de puissances différentes et immuables ; la bible déjà distinguait des séraphins, des chérubins, des archanges et des anges.
Le récit se termine souvent par la défaite des héros les plus autocrates, afin de proposer comme morale (en filigrane) qu’il vaut bien mieux céder un peu de nos libertés à ces insupportables bureaucraties que de dépendre de l’arbitraire et parfois violent maître à l’ancienne. Et voilà comment on évacue la question du juste niveau de paperasses, du coup la fonctionnarisation de nos sociétés ( secteur public comme secteur privé ) est en augmentation sans fin.
Dans nos loges et obédiences le modèle de démocratie, au sens d’un pilotage par le vote d’une majorité, est parfois appliqué, et dans d’autres cas le vote est réservé à une plus petite partie. Il y a croisement entre une égalité des membres à un grade donné et des domaines réservés à certains, comme les tenants d’un grade supérieur, ou d’un poste d’officier ( actuellement ou précédemment : cas des « passés maîtres » ), ou parfois de la qualité de fondateur de la loge. Bref nous sommes quelque part entre démocratie horizontale et aristocratie verticale ( au sens de « pouvoir de décision à ceux qui sont le plus qualifiés pour décider » ) .
Observons aussi, c’est humain, que moins il y a de personnes impliquées, moins il est « rentable » d’écrire des procédures détaillées, c’est pourquoi le plaisir d’une liberté moins bridée se retrouve en grimpant dans les niveaux hiérarchiques. C’est donc là que la menace de l’arbitraire pointe à nouveau son nez, et c’est là que convergent les assoiffés de pouvoir que Pierre Audureau dénonçait dans son « une franc-maçonnerie dévoyée par l’ego ».
Dans les niveaux élevés de management, les règles à suivre sont remplacées par des objectifs à atteindre. Un nouveau grand maître communique par ses discours les objectifs qu’il (ou elle ) se fixe avec son équipe pendant le mandat.
Que pouvons-nous faire pour réduire l’arbitraire, et/ou le sentiment d’iniquité qui nous gagne parfois, même en maçonnerie ?
Premier outil classique : la transparence. Si sur un certain domaine nous souhaitons un mode un peu aristocratique, affichons le et expliquons le. Par exemple, on trouvera peu de monde en faveur d’une démocratie avec désignation par tirage au sort, dans la population, des directeurs de centrale nucléaire.
Plus généralement, la contractualisation est un outil qui, après réflexion sur les modes de gouvernance, acte l’accord de tous sur le résultat des discussions.
Une remarque à ce propos. On entend parfois en maçonnerie « le candidat peut à tout moment se retirer si les engagements demandés ne lui conviennent pas », affirmant donc la transparence et la liberté de choix. Dans les faits, lorsqu’on est depuis des mois ou années motivé par une entrée dans l’ordre, on ne s’attarde pas sur un petit flou de compréhension ou un non-dit (de plus, le règlement intérieur n’est pas exposé lors des cérémonies), et ce n’est pas au beau milieu d’une cérémonie qu’on va se mettre à décortiquer tel ou tel article. Bref, c’est sur le silencieux banc des apprentis que l’on découvre la gouvernance réelle, et là on ne risque pas d’intervenir dans les cinq minutes…
Mon expérience maçonnique n’est pas fort longue en durée, cependant elle me suggère que beaucoup de loges, bâties au temps de l’amitié forte des fondateurs, disposent de chartes et autres règlements intérieurs conçus pour « quand tout va bien », mais auraient intérêt à une réflexion, tant que la sérénité est encore pleinement présente, sur les garde-fous à mettre en place en prévision de l’arrivée de la saison des tempêtes.
La réflexion pourrait démarrer sur le mode « Titanic », soit : quelle est la pire situation à redouter, et que mettons nous en place comme mesures préventives et curatives ? Puis continuer sur d’autres situations pénibles à éviter. Il en résulterait à la fin des règles de conduite et de vie que tous devraient connaître, s’appliquer à soi ainsi qu’aux autres, en toute fraternité. Est-ce nécessaire à ce stade de rappeler que l’égo de certains est le loup à repérer et à canaliser ?
La conclusion de tout cela est que l’équilibre entre choix horizontaux basés sur l’égalité des droits et choix verticaux basés sur des qualifications à objectiver est un processus délicat et important, à dérouler en début de vie de la loge, et à maintenir vivant tout au long de son activité.
Et vous, où en est votre combat contre l’arbitraire ?
Vertical / horizontal : une simple dualité ou une opposition dans nos loges ?
En franc-maçonnerie on étudie le vertical avant l’horizontal. Serait-ce pour la même raison qui fait placer la liberté avant l’égalité/fraternité ? Certes, il faut commencer par se connaître, comme individu unique, d’où le un, qui précède le deux, nécessaire si on veut comparer deux êtres ou deux choses sur un critère pour en supputer l’égalité ou l’inégalité. Ce un, barre verticale, précède, lorsque l’on compte, les deux êtres juxtaposés.
Mais le vertical symbolise aussi la relation dominant/dominé, et nos deux derniers millénaires ont vu une marche vers l’égalité des droits. Le dominant peut a priori exercer son pouvoir comme bon lui semble, d’où les expressions comme « le fait du prince ».
Il semble bien que l’écriture ait été inventée pour les inventaires de l’administration, en Mésopotamie selon les connaissances actuelles, preuve que la bureaucratie existait déjà, avec cette fonction d’objectivation par les quantités.
Par extension, les peuples ont accepté les procédures bureaucratiques dans l’espoir ou la croyance qu’il en résulterait un traitement plus égalitaire ou plus fiable. Cependant, toute procédure nécessite fréquemment une interprétation, laquelle sera alors effectuée par un tenant des dominants.
Etape supplémentaire : réclamer des procédures de plus en plus précises, afin d’obtenir la transparence et diminuer les interprétations arbitraires. Mais cela n’aboutit qu’à reporter le pouvoir d’accorder des dérogations aux règles à un échelon supérieur…le vertical gagne toujours, en dernier ressort.
Sous l’étouffoir procédurier liberticide, les peuples ont besoin d’une soupape : ce sera le rêve. D’où le succès des contes de fée dès l’enfance, qui se poursuit ensuite par les légendes, épopées héroïques, mythes, romans … Qu’y voyons nous ? Des héros puissants, bénéfiques ou maléfiques, qui ne s’embarrassent pas de droits, de paperasses, ni d’égalité . La liberté est souvent éliminée dès le départ en créant des hiérarchies d’êtres de puissances différentes et immuables ; la bible déjà distinguait des séraphins, des chérubins, des archanges et des anges.
Le récit se termine souvent par la défaite des héros les plus autocrates, afin de proposer comme morale (en filigrane) qu’il vaut bien mieux céder un peu de nos libertés à ces insupportables bureaucraties que de dépendre de l’arbitraire et parfois violent maître à l’ancienne. Et voilà comment on évacue la question du juste niveau de paperasses, du coup la fonctionnarisation de nos sociétés ( secteur public comme secteur privé ) est en augmentation sans fin.
Dans nos loges et obédiences le modèle de démocratie, au sens d’un pilotage par le vote d’une majorité, est parfois appliqué, et dans d’autres cas le vote est réservé à une plus petite partie. Il y a croisement entre une égalité des membres à un grade donné et des domaines réservés à certains, comme les tenants d’un grade supérieur, ou d’un poste d’officier ( actuellement ou précédemment : cas des « passés maîtres » ), ou parfois de la qualité de fondateur de la loge. Bref nous sommes quelque part entre démocratie horizontale et aristocratie verticale ( au sens de « pouvoir de décision à ceux qui sont le plus qualifiés pour décider » ) .
Observons aussi, c’est humain, que moins il y a de personnes impliquées, moins il est « rentable » d’écrire des procédures détaillées, c’est pourquoi le plaisir d’une liberté moins bridée se retrouve en grimpant dans les niveaux hiérarchiques. C’est donc là que la menace de l’arbitraire pointe à nouveau son nez, et c’est là que convergent les assoiffés de pouvoir que Pierre Audureau dénonçait dans son « une franc-maçonnerie dévoyée par l’ego ».
Dans les niveaux élevés de management, les règles à suivre sont remplacées par des objectifs à atteindre. Un nouveau grand maître communique par ses discours les objectifs qu’il (ou elle ) se fixe avec son équipe pendant le mandat.
Que pouvons-nous faire pour réduire l’arbitraire, et/ou le sentiment d’iniquité qui nous gagne parfois, même en maçonnerie ?
Premier outil classique : la transparence. Si sur un certain domaine nous souhaitons un mode un peu aristocratique, affichons le et expliquons le. Par exemple, on trouvera peu de monde en faveur d’une démocratie avec désignation par tirage au sort, dans la population, des directeurs de centrale nucléaire.
Plus généralement, la contractualisation est un outil qui, après réflexion sur les modes de gouvernance, acte l’accord de tous sur le résultat des discussions.
Une remarque à ce propos. On entend parfois en maçonnerie « le candidat peut à tout moment se retirer si les engagements demandés ne lui conviennent pas », affirmant donc la transparence et la liberté de choix. Dans les faits, lorsqu’on est depuis des mois ou années motivé par une entrée dans l’ordre, on ne s’attarde pas sur un petit flou de compréhension ou un non-dit (de plus, le règlement intérieur n’est pas exposé lors des cérémonies), et ce n’est pas au beau milieu d’une cérémonie qu’on va se mettre à décortiquer tel ou tel article. Bref, c’est sur le silencieux banc des apprentis que l’on découvre la gouvernance réelle, et là on ne risque pas d’intervenir dans les cinq minutes…
Mon expérience maçonnique n’est pas fort longue en durée, cependant elle me suggère que beaucoup de loges, bâties au temps de l’amitié forte des fondateurs, disposent de chartes et autres règlements intérieurs conçus pour « quand tout va bien », mais auraient intérêt à une réflexion, tant que la sérénité est encore pleinement présente, sur les garde-fous à mettre en place en prévision de l’arrivée de la saison des tempêtes.
La réflexion pourrait démarrer sur le mode « Titanic », soit : quelle est la pire situation à redouter, et que mettons nous en place comme mesures préventives et curatives ? Puis continuer sur d’autres situations pénibles à éviter. Il en résulterait à la fin des règles de conduite et de vie que tous devraient connaître, s’appliquer à soi ainsi qu’aux autres, en toute fraternité. Est-ce nécessaire à ce stade de rappeler que l’égo de certains est le loup à repérer et à canaliser ?
La conclusion de tout cela est que l’équilibre entre choix horizontaux basés sur l’égalité des droits et choix verticaux basés sur des qualifications à objectiver est un processus délicat et important, à dérouler en début de vie de la loge, et à maintenir vivant tout au long de son activité.
Et vous, où en est votre combat contre l’arbitraire ?
patos- Admin
- Messages : 5368
Date d'inscription : 15/09/2015
Age : 71
Localisation : Drôme
Re: franc-maçonnerie : dominance ou démocratie ?
Des réactions d'autres maçons ? Je suis curieux de lire d'autres retours à ce sujet.
Planck- Sage Confirmé
- Messages : 559
Date d'inscription : 23/02/2020
Localisation : Rhône-Alpes
Re: franc-maçonnerie : dominance ou démocratie ?
Sans vouloir tout décortiquer dans l'abondant et utile message de Patos on peut relever de ci de là des éléments particuliers. Un président fondateur passé son temps redevient membre ordinaire. Les postes importants de présidence par exemple sont électifs et temporaires. Les Grades ou degrés ne donnent aucun droit pratique. Un 33e en loge symbolique est un Maître Maçon comme un autre. Son prestige est horizontal.Les règles de précaution sont présentes tout comme le mélange des personnes et des, thèmes, avec des loges différentes et suivant des difficultés pro gressives. C'est ce brassage permanent qui fait entre autres l'intérêt de la FM.
_________________
"Parmi les sons qui peuplent la Nature,court une mélodie secrète....pour celui qui écoute." (Schlegel)
Luciole- Grand Maitre Suprême
- Messages : 5115
Date d'inscription : 02/01/2016
Localisation : Paris,Ile de France
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