Marcel Jouhandeau - Réflexions sur la vie et le bonheur

Bon, inutile de faire des phrases à rallonge, vous avez bien capté l'entreprise de l'auteur. Sous forme de cahiers, dix au total, Jouhandeau jette sans trop retoucher le fil de sa pensée. Si vous cherchez un second souffle en cette période où l’humanité n’a peut-être jamais respiré par des organes aussi insensibles, voici une poche d'oxygène. Point de concept ici, aucun dogme ni certitude. L'atmosphère est à la réflexion-promenade. Nous déambulons. A chaque page, difficile de ne pas se saisir d'un crayon pour entourer une phrase qui nous parle :

"Le comble de la force morale, c'est de garder le silence dans n'importe quelle circonstance, tout le temps qu'il ne s'agit que de soi."

"Le bonheur n'a aucun rapport avec le bien-être, puisqu'on peut passer sa vie, comme si de rien n'était, auprès d'un être impossible, hirsute, intraitable, alors que la fadeur et la facilité de n'importe qui d'autre vous eût jeté dans le plus mortel ennui."

"C'est bien plutôt de la dureté de notre cœur que de sa délicatesse que souffre notre intelligence, notre intelligence des autres. Nous sommes toujours trop tendres avec nous-mêmes."

"La vie n'est qu'un immense tissu de solitudes, où chacun éprouve selon l'heure sa volupté ou son martyre incommunicables, comme un secret écrit en une langue perdue. Pour m'étonner du pouvoir que j'ai de déranger le silence, il m'arrive de parler tout haut la nuit et rien ne me trouble davantage."