Deux joyaux de Verlaine
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Deux joyaux de Verlaine
Je sais que vous en rêviez ! Alors voici deux joyaux de Paul Verlaine, le compagnon tragique et passionnel de Rimbaud. En outre, comment animer une section poésie sans publier du Verlaine ? Ce serait une lacune, donc...
EXTRAIT DE LA "BONNE CHANSON" (1871) Poème XIX
Donc, ce sera par un clair jour d'été;
Le grand soleil, complice de ma joie,
Fera, parmi le satin et la soie,
Plus belle encor votre chère beauté;
Le ciel tout bleu, comme une haute tente,
Frissonnera somptueux à longs plis
Sur nos deux fronts heureux qu'auront pâlis
L'émotion du bonheur et l'attente;
Et quand le soir viendra, l'air sera doux
Qui se jouera, caressant, dans vos voiles,
Et les regards paisibles des étoiles
Bienveillamment souriront aux époux.
§§§§§§§§§§§§§§
Poème XX
J'allais par de chemins perfides,
Douloureusement incertain.
Vos chères mains furent mes guides.
Si pâle à l'horizon lointain
Luisait un faible espoir d'aurore;
Votre regard fut le matin.
Nul bruit, sinon son pas sonore,
N'encourageait le voyageur.
Votre voix me dit : "Marche encore !"
Mon coeur craintif, mon sombre coeur
Pleurait, seul, sur la triste voie;
L'amour, délicieux vainqueur,
Nous a réunis dans la joie.
§§§§§§§§§§§§§§
EXTRAIT DE LA "BONNE CHANSON" (1871) Poème XIX
Donc, ce sera par un clair jour d'été;
Le grand soleil, complice de ma joie,
Fera, parmi le satin et la soie,
Plus belle encor votre chère beauté;
Le ciel tout bleu, comme une haute tente,
Frissonnera somptueux à longs plis
Sur nos deux fronts heureux qu'auront pâlis
L'émotion du bonheur et l'attente;
Et quand le soir viendra, l'air sera doux
Qui se jouera, caressant, dans vos voiles,
Et les regards paisibles des étoiles
Bienveillamment souriront aux époux.
§§§§§§§§§§§§§§
Poème XX
J'allais par de chemins perfides,
Douloureusement incertain.
Vos chères mains furent mes guides.
Si pâle à l'horizon lointain
Luisait un faible espoir d'aurore;
Votre regard fut le matin.
Nul bruit, sinon son pas sonore,
N'encourageait le voyageur.
Votre voix me dit : "Marche encore !"
Mon coeur craintif, mon sombre coeur
Pleurait, seul, sur la triste voie;
L'amour, délicieux vainqueur,
Nous a réunis dans la joie.
§§§§§§§§§§§§§§
Invité- Invité
Re: Deux joyaux de Verlaine
J'ai presque peur....
J'ai presque peur, en vérité,
Tant je sens ma vie enlacée
À la radieuse pensée
Qui m'a pris l'âme l'autre été,
Tant votre image, à jamais chère,
Habite en ce coeur tout à vous,
Mon coeur uniquement jaloux
De vous aimer et de vous plaire ;
Et je tremble, pardonnez-moi
D'aussi franchement vous le dire,
À penser qu'un mot, un sourire
De vous est désormais ma loi,
Et qu'il vous suffirait d'un geste,
D'une parole ou d'un clin œil,
Pour mettre tout mon être en deuil
De son illusion céleste.
Mais plutôt je ne veux vous voir,
L'avenir dût-il m'être sombre
Et fécond en peines sans nombre,
Qu'à travers un immense espoir,
Plongé dans ce bonheur suprême
De me dire encore et toujours,
En dépit des mornes retours,
Que je vous aime, que je t'aime !
Verlaine
J'ai presque peur, en vérité,
Tant je sens ma vie enlacée
À la radieuse pensée
Qui m'a pris l'âme l'autre été,
Tant votre image, à jamais chère,
Habite en ce coeur tout à vous,
Mon coeur uniquement jaloux
De vous aimer et de vous plaire ;
Et je tremble, pardonnez-moi
D'aussi franchement vous le dire,
À penser qu'un mot, un sourire
De vous est désormais ma loi,
Et qu'il vous suffirait d'un geste,
D'une parole ou d'un clin œil,
Pour mettre tout mon être en deuil
De son illusion céleste.
Mais plutôt je ne veux vous voir,
L'avenir dût-il m'être sombre
Et fécond en peines sans nombre,
Qu'à travers un immense espoir,
Plongé dans ce bonheur suprême
De me dire encore et toujours,
En dépit des mornes retours,
Que je vous aime, que je t'aime !
Verlaine
Re: Deux joyaux de Verlaine
Merci Loli pour cet ajout de charme ! Bien sûr si vous tous avez envie de nous faire partager d'autres poèmes de Verlaine, n'hésitez pas.
Il est sublime celui-ci Loli, sublime...
Il est sublime celui-ci Loli, sublime...
Invité- Invité
Re: Deux joyaux de Verlaine
Bon d'habitude je fais une petite analyse et j'explique pourquoi, là la paresse m'assaille : j'aime. Je ne peux que vous encourager dans ce partage de Verlaine ( qui est un de mes poètes préférés), et dans sa lecture !
Littlewingrunner- Petit Sage
- Messages : 460
Date d'inscription : 24/02/2012
Localisation : Ile de France
Re: Deux joyaux de Verlaine
Mon préféré de Verlaine :
Clair de lune
Votre âme est un paysage choisi
Que vont charmant masques et bergamasques,
Jouant du luth et dansant et quasi
Tristes sous leurs déguisements fantasques.
Tout en chantant sur le mode mineur
L’amour vainqueur et la vie opportune,
Ils n’ont pas l’air de croire à leur bonheur
Et leur chanson se mêle au clair de lune,
Au calme clair de lune triste et beau,
Qui fait rêver les oiseaux dans les arbres
Et sangloter d’extase les jets d’eau,
Les grands jets d’eau sveltes parmi les marbres.
Clair de lune
Votre âme est un paysage choisi
Que vont charmant masques et bergamasques,
Jouant du luth et dansant et quasi
Tristes sous leurs déguisements fantasques.
Tout en chantant sur le mode mineur
L’amour vainqueur et la vie opportune,
Ils n’ont pas l’air de croire à leur bonheur
Et leur chanson se mêle au clair de lune,
Au calme clair de lune triste et beau,
Qui fait rêver les oiseaux dans les arbres
Et sangloter d’extase les jets d’eau,
Les grands jets d’eau sveltes parmi les marbres.
Re: Deux joyaux de Verlaine
Puisque chacun y va de son poème, voici le mien :
Allégorie
Despotique, pesant, incolore, l'Eté,
Comme un roi fainéant présidant un supplice,
S'étire par l'ardeur blanche du ciel complice
Et bâille. L'homme dort loin du travail quitté.
L'alouette au matin, lasse, n'a pas chanté,
Pas un nuage, pas un souffle, rien qui plisse
Ou ride cet azur implacablement lisse
Où le silence bout dans l'immobilité.
L'âpre engourdissement a gagné les cigales
Et sur leur lit étroit de pierres inégales
Les ruisseaux à moitié taris ne sautent plus.
Une rotation incessante de moires
Lumineuses étend ses flux et ses reflux...
Des guêpes, çà et là, volent, jaunes et noires.
Allégorie
Despotique, pesant, incolore, l'Eté,
Comme un roi fainéant présidant un supplice,
S'étire par l'ardeur blanche du ciel complice
Et bâille. L'homme dort loin du travail quitté.
L'alouette au matin, lasse, n'a pas chanté,
Pas un nuage, pas un souffle, rien qui plisse
Ou ride cet azur implacablement lisse
Où le silence bout dans l'immobilité.
L'âpre engourdissement a gagné les cigales
Et sur leur lit étroit de pierres inégales
Les ruisseaux à moitié taris ne sautent plus.
Une rotation incessante de moires
Lumineuses étend ses flux et ses reflux...
Des guêpes, çà et là, volent, jaunes et noires.
Littlewingrunner- Petit Sage
- Messages : 460
Date d'inscription : 24/02/2012
Localisation : Ile de France
Re: Deux joyaux de Verlaine
Oh et l'Art poétique !
De la musique avant toute chose,
Et pour cela préfère l'Impair
Plus vague et plus soluble dans l'air,
Sans rien en lui qui pèse ou qui pose.
Il faut aussi que tu n'ailles point
Choisir tes mots sans quelque méprise :
Rien de plus cher que la chanson grise
Ou l'Indécis au Précis se joint.
C'est de beaux yeux derrière des voiles,
C'est le grand jour tremblant de midi ;
C'est par un ciel d'automne attiédi,
Le bleu fouillis des claires étoiles !
Car nous voulons la Nuance encor,
Pas la couleur, rien que la Nuance !
Oh ! la nuance seule fiance
Le rêve au rêve et la flûte au cor !
Fuis du plus loin la Pointe assassine,
L'Esprit cruel et le Rire impur,
Qui font pleurer les yeux de l'Azur,
Et tout cet ail de basse cuisine !
Prends l'éloquence et tords-lui son cou !
Tu feras bien, en train d'énergie,
De rendre un peu la Rime assagie.
Si l'on y veille, elle ira jusqu'où ?
Ô qui dira les torts de la Rime !
Quel enfant sourd ou quel nègre fou
Nous a forgé ce bijou d'un sou
Qui sonne creux et faux sous la lime ?
De la musique encore et toujours !
Que ton vers soit la chose envolée
Qu'on sent qui fuit d'une âme en allée
Vers d'autres cieux à d'autres amours.
Que ton vers soit la bonne aventure
Éparse au vent crispé du matin
Qui va fleurant la menthe et le thym...
Et tout le reste est littérature.
De la musique avant toute chose,
Et pour cela préfère l'Impair
Plus vague et plus soluble dans l'air,
Sans rien en lui qui pèse ou qui pose.
Il faut aussi que tu n'ailles point
Choisir tes mots sans quelque méprise :
Rien de plus cher que la chanson grise
Ou l'Indécis au Précis se joint.
C'est de beaux yeux derrière des voiles,
C'est le grand jour tremblant de midi ;
C'est par un ciel d'automne attiédi,
Le bleu fouillis des claires étoiles !
Car nous voulons la Nuance encor,
Pas la couleur, rien que la Nuance !
Oh ! la nuance seule fiance
Le rêve au rêve et la flûte au cor !
Fuis du plus loin la Pointe assassine,
L'Esprit cruel et le Rire impur,
Qui font pleurer les yeux de l'Azur,
Et tout cet ail de basse cuisine !
Prends l'éloquence et tords-lui son cou !
Tu feras bien, en train d'énergie,
De rendre un peu la Rime assagie.
Si l'on y veille, elle ira jusqu'où ?
Ô qui dira les torts de la Rime !
Quel enfant sourd ou quel nègre fou
Nous a forgé ce bijou d'un sou
Qui sonne creux et faux sous la lime ?
De la musique encore et toujours !
Que ton vers soit la chose envolée
Qu'on sent qui fuit d'une âme en allée
Vers d'autres cieux à d'autres amours.
Que ton vers soit la bonne aventure
Éparse au vent crispé du matin
Qui va fleurant la menthe et le thym...
Et tout le reste est littérature.
Re: Deux joyaux de Verlaine
Que pourrais-je rajouter ? Vous comblez nos sens ! Et vous faites découvrir de la belle poésie, c'est fort agréable...
Invité- Invité
Re: Deux joyaux de Verlaine
Hier, on parlait de choses et d'autres
Et mes yeux allaient recherchant les vôtres ;
Et votre regard recherchait le mien
Tandis que courait toujours l'entretien.
Sous le sens banal des phrases pesées
Mon amour errait après vos pensées ;
Et quand vous parliez, à dessein distrait
Je prêtais l'oreille à votre secret :
Car la voix, ainsi que les yeux de Celle
Qui vous fait joyeux et triste, décèle
Malgré tout effort morose ou rieur
Et met au plein jour l'être intérieur.
Or, hier je suis partie pleine d'ivresse :
Est-ce un espoir vain que mon coeur caresse,
Un vain espoir, faux et doux compagnon ?
Oh ! non ! n'est-ce pas ? n'est-ce pas que non ?
Paul Verlaine
Re: Deux joyaux de Verlaine
Visiblement vous aimez beaucoup Verlaine ! Vous avez du goût... Comment pourrait-on résister à l'un des plus grands princes de la poésie ?
Invité- Invité
Re: Deux joyaux de Verlaine
Je n'ai pas de préférence pour un poète en particulier...parfois des poémes d'anoymes trouvés sur le net sont aussi sublimes
Mais comme c'est un topic sur Verlaine je mets ceux que j'aime bien.. .
Mais comme c'est un topic sur Verlaine je mets ceux que j'aime bien.. .
Re: Deux joyaux de Verlaine
Bien sûr Loli, je disais cela comme ça... C'est très bien. Personnellement je suis très classique en matière de poésie, j'ai ma période préférée (dont Verlaine fait partie), mais c'est lié à mes goûts personnels.
Invité- Invité
Re: Deux joyaux de Verlaine
Ma belle
Ma belle un jour dessus son lit j'approche
Qui me baisant là sous moi frétillait
Et de ses bras mon col entortillait
Comme un Lierre une penchante Roche.
Au fort de l'aise et la pâmoison proche
Il me sembla que son oeil se fermait,
Qu'elle était froide et qu'elle s'endormait
Dont courroucé je lui fis ce reproche :
Vous dormez donc ! Quoi Madame êtes-vous
Si peu sensible à des plaisirs si doux ?
Lors me jetant une oeillade lascive
Elle me dit : Non non mon cher désir
Je ne dors pas mais j'ai si grand plaisir
Que je ne sais si je suis morte ou vive.
Il est pas mal aussi celui-ci
(j'ai oublié le nom de l'auteur) Désolée ce n'est pas Verlaine, mais je ne savais pas où le mettre
Ma belle un jour dessus son lit j'approche
Qui me baisant là sous moi frétillait
Et de ses bras mon col entortillait
Comme un Lierre une penchante Roche.
Au fort de l'aise et la pâmoison proche
Il me sembla que son oeil se fermait,
Qu'elle était froide et qu'elle s'endormait
Dont courroucé je lui fis ce reproche :
Vous dormez donc ! Quoi Madame êtes-vous
Si peu sensible à des plaisirs si doux ?
Lors me jetant une oeillade lascive
Elle me dit : Non non mon cher désir
Je ne dors pas mais j'ai si grand plaisir
Que je ne sais si je suis morte ou vive.
Il est pas mal aussi celui-ci
(j'ai oublié le nom de l'auteur) Désolée ce n'est pas Verlaine, mais je ne savais pas où le mettre
Re: Deux joyaux de Verlaine
Auvray. Mais c'est une autre période - 17ème il me semble ? - et le titre complet est le nom du premier vers, comme dans la majorité des poèmes de l'époque.
Littlewingrunner- Petit Sage
- Messages : 460
Date d'inscription : 24/02/2012
Localisation : Ile de France
Re: Deux joyaux de Verlaine
J'allais chercher dans ma documentation mais LR m'a devancé ! Bravo LR, je suis impressionné... De mon côté je vais voir ce que je trouve concernant ce poète, que je ne connais pas. Mais son poème est absolument sublime...
Invité- Invité
Re: Deux joyaux de Verlaine
Il est superbe, et j'aime bien sa pointe d'humour..
Il faudrait ouvrir un topic pour mettre que des poèmes en vrac, qu'on aime....
Il faudrait ouvrir un topic pour mettre que des poèmes en vrac, qu'on aime....
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